Manifeste scandaleux: le SPD ébranle le consensus antirusse

12.06.2025

Stupeur pour la CDU/CSU, le FDP et les Verts en Allemagne et pour les ministres SPD du gouvernement allemand de Merz qui soutiennent le conflit en Ukraine. Le SPD et les Linke veulent dialoguer avec Moscou en se tournant vers la Russie. Les va-t-en-guerre d’outre-Rhin sont confrontés à une demande de changement politique envers la Russie. En outre, le tournant du SPD et des Linke va dans le sens des exigences de l’AfD pour la bonne entente avec Moscou. 

Révolte au sein du SPD. Des caciques du parti allemand SPD, mais aussi des Linke, exigent la «paix avec la Russie» et le rejet des missiles américains. Le tournant vient du manifeste «Assurer la paix en Europe grâce à la capacité de défense, au contrôle des armements et à la compréhension» du SPD. «Des membres éminents du SPD appellent à des négociations avec la Russie dans un «manifeste» et s'opposent directement aux projets du gouvernement et de la direction du SPD», annonce Stern.

Après la publication du «manifeste» du SPD par d'éminents politiciens de ce parti politique exigeant un changement de politique étrangère, le parti de gauche (Die Linke) a proposé sa coopération aux sociaux-démocrates (SPD). 

Parmi les signataires du manifeste figurent l'ancien chef de groupe parlementaire Rolf Mützenich (SPD), l'ancien chef du SPD Norbert Walter-Borjans et l'éminent homme d'extrême gauche, député SPD au Bundestag, Ralf Stegner. Avec plusieurs dizaines d'autres signataires, ils s'opposent à des aspects essentiels de la politique étrangère et de sécurité du ministre de la Défense Boris Pistorius et du ministre des Finances Lars Klingbeil (tous deux SPD). 

L'Alliance Sahra Wagenknecht - Pour la raison et la justice est un parti politique allemand populiste de gauche créé le 8 janvier 2024 (BSW) se réjouit aussi de ce tournant qui peut être qualifié d’historique. Sahra Wagenknecht a publié sur son compte X: «Il s'agit d'une initiative urgente. Il est bon qu'il existe encore des responsables politiques du SPD qui n'aient pas complètement oublié l'héritage de Willy Brandt. Il est important que les auteurs critiquent également le déploiement prévu de missiles américains de moyenne portée en Allemagne, provoqué par Olaf Scholz, mais ce qui peut encore être évité. Il serait souhaitable que toutes les forces en Allemagne qui considèrent la stratégie de guerre de Friedrich Merz et de Lars Klingbeil [président du SPD, vice-chancelier, ministre fédéral des Finances] comme extrêmement dangereuse collaborent désormais sans réserve et s'efforcent ensemble de réactiver un mouvement pacifiste fort. Le BSW est volontiers disposé à s'engager dans une telle coopération». 

L’AfD, par la plume de son député du Bundestag, Markus Frohnmaier, se félicite du tournant historique des cadres du SPD. Dans un communiqué, le porte-parole de la politique étrangère d’AfD stipule: «Le SPD a désormais adopté la même position que le groupe parlementaire de l'AfD depuis le début du conflit en Ukraine: nous devons renoncer à la voie extrêmement dangereuse de la confrontation avec la Russie et, enfin, déployer de sérieux efforts diplomatiques en faveur de la paix. L'Allemagne ne doit plus s'engager dans une guerre qui n'est pas la nôtre et qui est stratégiquement ingagnable». 

Le chef du SPD, Lars Klingbeil, a pris ses distances avec le document d'orientation de plusieurs responsables politiques du SPD appelant à une réorientation de la politique de défense et à des négociations avec la Russie. Selon le SPD, le vice-chancelier a explicitement exprimé son désaccord avec plusieurs déclarations du manifeste lors d'une conversation en direct avec Kevin Kühnert sur Instagram: «Nous n'avons pas besoin d'un retour en arrière concernant le soutien à l'Ukraine». 

Malgré les appels du SPD à la fin du réarmement et aux négociations directes avec la Russie, le chancelier allemand, Friedrich Merz, compte sur l'unité au sein de la coalition de l'Union chrétienne-démocrate (CDU/CSU/SPD). «Au sein du gouvernement fédéral, entre la CDU, la CSU et le SPD, nous sommes en parfaite harmonie sur notre évaluation de la guerre menée par la Russie contre l'Ukraine et sur les conséquences à en tirer», a-t-il déclaré lors d'une rencontre avec la Première ministre danoise, Mette Frederiksen, à Berlin. «Et je compte sur la pérennité de cette unité», a-t-il ajouté. 

En raison des récentes attaques russes contre l'Ukraine, Friedrich Merz a déclaré que toute personne dotée d'un minimum de lucidité devait reconnaître que «la Russie représente une menace pour la sécurité de l'Alliance tout entière». «En prévision du sommet de l'OTAN à La Haye dans deux semaines», note Merkur.de, le chancelier allemand a souligné: «La Russie représente un risque pour la sécurité des deux côtés de l'Atlantique». Par conséquent, une augmentation historique et durable des dépenses de défense sera décidée lors de ce sommet. «Ensemble, nous renforcerons le pilier européen de l'OTAN», a fait savoir Friedrich Merz, malgré le manifeste du SPD et de la convergence des Linke et de l’AfD signalant une forte oppostion à Merz pour le conflit contre la Russie. 

Alors que le ministre de la Défense Boris Pistorius est arrivé à Kiev ce jeudi pour négocier une aide militaire supplémentaire à l'Ukraine, un conflit acharné sur la politique russe continue de faire rage au sein de son propre parti en annonçant aussi une fissure dans la politique allemande.

Pierre Duval 

Les opinions exprimées par les analystes ne peuvent être considérées comme émanant des éditeurs du portail. Elles n'engagent que la responsabilité des auteurs 

Abonnez-vous à notre chaîne Telegram: https://t.me/observateur_continental